La pandémie de Covid-19 aura mis sur le devant de la scène les outils de télétravail. Parmi eux, Teams, l’outil collaboratif du géant Microsoft. Qui franchit une nouvelle étape en intégrant la téléphonie fixe, et en permettant de centraliser tous les appels d’entreprise, entrants et sortants. Le bon moment pour faire le point sur cette technologie.
Teams, vous le connaissez peut-être. Ou en tout cas, vous y avez été confronté lors d’une des visioconférences dont l’usage a explosé depuis début 2020. Intégré à Microsoft 365, il permet la collaboration audio ou vidéo et le partage d’écran, et facilite le travail d’équipe et la gestion de projets.
La possibilité de passer des appels téléphoniques via Teams n’est pas nouvelle. Quelques opérateurs présents en Romandie proposent ce service depuis plusieurs mois. Mais la nouveauté vient maintenant de la possibilité de souscrire numéros et forfaits d’appel directement depuis Microsoft, qui devient alors votre opérateur téléphonique fixe. Probablement le bon moment pour faire le tour de cette solution.
Des forfaits encore flous
Si, lors de la mise à disposition du service le 1er octobre dernier, seul le plus petit des forfaits était disponible, plusieurs paliers sont désormais disponibles. Ils vous laissent la possibilité d’opter pour des appels nationaux uniquement, ou des appels nationaux et internationaux. Mais tout n’est malheureusement pas aussi clair, ou simple, c’est au choix.
A y regarder de près, utiliser Teams pour remplacer son central téléphonique virtuel coûte… le prix d’un central téléphonique virtuel !
Alors que la documentation Microsoft en ligne fait référence à 4 tarifs – 120, 240 et 1200 minutes d’appels nationaux, et un plan d’appels internationaux, le système de commande ne donne accès qu’à 3 options. Et on ne retrouve pas les volumes de minutes mentionnés par Microsoft. Il n’est pas non plus indiqué clairement si les appels vers les mobiles sont inclus. A 5 centimes la minute pour le plus petit forfait, on peut en douter.
Il est donc urgent d’attendre un peu plus de transparence de la part de Microsoft sur ses tarifs. Ou de s’en remettre à un opérateur national pour le paiement de ses communications. On ne s’improvise pas opérateur téléphonique. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux en Suisse à fournir une interconnexion Teams : citons VTX, Sunrise ou encore PeoplePhone.
Coûts : les poupées russes
Mais vos dépenses ne s’arrêteront pas là. En plus des communications, vous devrez tout d’abord disposer d’une licence Teams. Petit rappel : Microsoft 365 Business Premium, le bestseller pour les PME, vous fournit un paquet de services et licences complet pour CHF 19.70, et inclut Teams. Si vous en disposez déjà, il n’y a donc pas de surcoût à supporter de ce côté-là. Mais vous devrez rajouter tout de même une autre licence Microsoft.
L’intégration de la téléphonie dans Teams constitue un plus indéniable pour la gestion au quotidien. Mais des progrès sont encore nécessaires.
Il en va en effet autrement de l’accès au service : ajoutez un abonnement mensuel « Phone System » à CHF 7.90 pour chaque utilisateur, et un forfait de communications simultanées – pour l’interconnexion avec Microsoft – si vous passez par un opérateur tiers. Si on exclut la licence Microsoft 365, comptez tout de même plus de cent francs par mois pour 10 utilisateurs, communications non-comprises.
A y regarder de près, ces coûts se rapprochent évidemment de ceux d’un central téléphonique virtuel, tel qu’il en existe maintenant depuis plusieurs années. Les opérateurs ou Microsoft ne souhaitent probablement pas se tirer une balle dans le pied. Alors quel est l’intérêt du système ? La réponse se trouve probablement dans les fonctionnalités et l’intégration.
Fonctionnalités : réalité et perspectives
En effet, disposer d’un système complet de communications unifiées (téléphonie, chat, audioconférence, visioconférence, partage d’écran), disponible sur tous ses appareils sans rien rajouter est un vrai plus, que ce soit pour mettre en place les comptes ou les supprimer, ou pour la gestion quotidienne. Tout comme la possibilité de gérer les appels entrants sur la base de groupes d’utilisateurs Microsoft 365 existants. Microsoft pousse le curseur de l’intégration d’un cran.
La montée en puissance de Microsoft dans la téléphonie est inéluctable.
Et pour aller encore plus loin, le géant du logiciel a annoncé la compatibilité de son système avec SIP, le protocole de facto pour la téléphonie par Internet, elle-même devenue un standard. Vous pourrez ainsi conserver vos appareils VoIP pour recevoir ou émettre vos appels téléphoniques, tout en migrant progressivement vers des applications sur PC ou smartphone.
Mais pour autant, le tableau n’est pas complètement rose, loin s’en faut. Tout d’abord, la configuration initiale n’est pas vraiment aisée. Alors que Microsoft s’est fait le spécialiste des interfaces « Playskool », simples à utiliser, la téléphonie Teams nécessite encore de passer par des lignes de commande anachroniques. On a du mal à imaginer un déploiement en masse avec de tels outils.
Microsoft Teams monte en puissance
Le portage des numéros existants directement chez Microsoft n’est pas non plus très clair. Pas plus que la réservation de nouveaux numéros. Là encore, il vaudra mieux s’en remettre à un opérateur local. Les fonctions de distribution des appels entrants nécessitent quant à elles un temps d’adaptation pour les appréhender, et si on note l’effort du géant de Redmond pour les rendre compréhensibles, elles mettent parfois plusieurs heures pour prendre effet. Déroutant.
La gestion des appels sortants n’est pas non plus exempte de reproche, et les opérateurs marquent encore des points en la matière. Masquer son numéro avec celui de la centrale n’est pas disponible de facto par exemple.
Si les fonctions de base sont assurées, le système nécessite donc encore un peu de mise au point. Tout le monde aura toutefois noté la montée en puissance de Microsoft en la matière. Et personne ne doute de leur capacité à progresser continuellement selon la méthode qui fait désormais référence : l’amélioration continue des logiciels et services. La percée de Teams sur ce marché semble alors inéluctable.
Emmanuel Dardaine